Les relations franco-québécoises pendant la Grande Guerre
Cette recherche porte sur les relations entre la France et le Québec au cours de la Première Guerre mondiale. En fondant la démarche sur l’analyse de sources tels les archives diplomatiques, les journaux, les publications d’époque, etc., il a été possible de voir que la guerre a offert des occasions d’intensifier et d’améliorer des relations entre la France et le Québec.
Du point de vue des relations commerciales et économiques, la guerre a vite montré les limites, voire la presque impossibilité d’établir et de gérer un commerce strictement franco-québécois. Les commerçants québécois avaient bien peu de poids face au monopole de la Hudson Bay Company, à la bureaucratie française, à l’absence de structures de transport et aussi face à l’intervention tardive de l’État.
Sur le plan sociomilitaire, selon une perspective française, le Québec n’a pas fourni une contribution militaire à l’égal de sa population. Par contre, les Canadiens français ont contribué à l’effort de guerre, par exemple en fournissant des hôpitaux militaires. Compte tenu du faible enrôlement, certains Français doutaient tout de même de la valeur que les Canadiens français accordaient à la cause alliée.
Pour les intellectuels canadiens-français, il est clair que la guerre avait permis de revoir sous un nouvel angle les discours sur la France, notamment sur le réveil religieux. Pour certains d’entre eux, même si l’influence culturelle de cette dernière était indéniable, fallait-il pour autant aller mourir dans les tranchées? Pour d’autres, il fallait tout de même passer outre à cette France laïque et collaborer à l’effort de guerre.
Il s’agissait là d’un travail considérable de changement de discours, car depuis le début du XXe siècle, le clergé autant que les intellectuels francophiles avaient décrié cet État qui faisait fi de son histoire et qui persécutait les catholiques. Il fallait donc montrer que ce renouveau religieux était réel et qu’il valait la peine d’aider la France.
Quant aux membres du clergé, on peut avancer que leur vision du conflit était partagée en deux, selon que les analyses provenaient du haut ou du bas clergé. Une partie du haut clergé appuyait officiellement l’effort de guerre du Canada. Par contre, le bas clergé n’hésitait pas à s’élever contre la conscription en chaire. Pour l’Église canadienne, le réveil religieux français était une carte importante à faire jouer auprès de ses ouailles. Mais là encore, cela ne suffît pas à augmenter l’enrôlement des Canadiens français.
La fin de la Grande Guerre ne changera pas radicalement la situation internationale du Canada, pas plus qu’elle ne le fera pour les rapports France-Québec. Il faudra attendre les années 1960 pour voir ces relations réellement se développer. Mais on peut tout de même croire que les événements de 1914-1918 avaient ouvert la voie.