L’enracinement des caisses populaires en milieu urbain : le cas de Trois-Rivières : 1945-1980
Sur un plan général, notre recherche retrace l’évolution d’un groupe de neuf caisses populaires dans un environnement et une période déterminés : la ville de Trois-Rivières entre 1945 et 1980. De façon plus particulière, nous abordons d’abord les caractéristiques socioéconomiques et démographiques des paroisses dans lesquelles évoluent chacune des caisses étudiées au cours des années considérées. Trois-Rivières nous est apparu comme un cas d’espèce particulièrement intéressant dans la mesure où les établissements à l’étude appartenaient à trois milieux aux caractéristiques contrastées : 1) les paroisses ouvrières; 2) le quartier central des affaires; 3) les nouveaux quartiers périphériques issues de l’étalement urbain des années 1950 et 1960. À ces milieux d’implantation différenciés ont correspondu des équipes de dirigeants, des modes d’insertion dans les réseaux associatifs et politiques locaux spécifiques, ainsi que des pratiques financières particulières.
Nous examinons ensuite les transformations du profil socioprofessionnel des dirigeants de manière à identifier les couches sociales qui se sont regroupées à la direction des caisses. Durant l’ensemble de la période considérée, trois groupes principaux s’affirment : 1) les gens d’affaires et les membres des professions libérales; 2) les agents des nouvelles classes moyennes (agents d’encadrement, cols blancs qualifiés, etc.); 3) les ouvriers et les employés. En fonction de la dynamique des quartiers et des périodes historiques, les alliances multiformes entre ces trois groupes présentent des états d’équilibre qui varient. De plus, de nombreux dirigeants de caisses se retrouvent à la tête d’organismes occupant une position centrale au sein du monde associatif et politique local, notamment à la Société Saint-Jean-Baptiste, à la Chambre de commerce, au Conseil municipal et au Conseil scolaire.
Nous retraçons enfin les changements survenus dans les pratiques financières des caisses populaires. Ces dernières se démarquent au niveau du prêt hypothécaire qui deviendra le fer de lance des pratiques de crédit du Mouvement. Dans ce contexte, les caisses ont joué un rôle majeur dans l’expansion du tissu urbain trifluvien en injectant des sommes importantes (par le prêt hypothécaire) dans la construction résidentielle et la création de quartiers habités par les nouvelles classes moyennes.