L’École normale de l’enseignement technique, l’Université nouvelle et la formation technique supérieure : histoire et analyse d'un échec
En 1964, en pleine Révolution tranquille au Québec, est créée l’École normale de l’enseignement technique (ENET). Sa raison d’être est la formation des professeurs de l’enseignement technique et professionnel et la mise à jour des professeurs de ce secteur d’enseignement déjà en exercice. Le Québec accuse un retard en formation technique et l’ENET, dans la foulée des développements effectués en Europe et aux États-Unis pour une université nouvelle, prône le développement d’un enseignement technique au niveau supérieur, tant pour la formation des professeurs que pour la création d’une nouvelle catégorie de techniciens. Depuis quelques années, des représentations étaient faites à différentes instances à ce sujet. Quelques mois après sa création, l’équipe de l’ENET se trouve impliquée dans le processus de développement de l’enseignement universitaire par la participation de son directeur au Comité Rocher, qui doit poursuivre le travail amorcé à la Commission Parent concernant la mise en place d’une nouvelle université de langue française à Montréal. L’ENET y propose la création d’un centre universitaire de sciences appliquées. Le Comité Rocher prône plutôt une université nouvelle qui développera une expertise dans une diversité de nouveaux champs d’études.
Appelée à fusionner, avec quatre autres établissements, à l’Université du Québec à Montréal, l’équipe de l’ENET tentera à nouveau d’inscrire la formation technique dans le curriculum universitaire, mais échouera une seconde fois. Dès sa création, on a voulu faire de l’ENET un établissement de niveau supérieur, mais devant l’urgence à former de nouveaux professeurs en enseignement technique, le projet ne s’est pas concrétisé. Dès le départ, l’ENET semblait voué à l’échec. Le statut d’école normale qui lui est attribué à un moment où celles-ci sont remises en question au point de recommander leur disparition, le climat d’urgence et de précipitation qui caractérise la mise en place des réformes et le besoin de diversification des profils d’enseignement universitaire ont tôt fait de lui imposer revers sur revers. Le présent mémoire décrit l’émergence et le parcours de l’ENET, et propose à travers une grille d’analyse d’une situation d’échec, des pistes pour comprendre pourquoi elle n’atteint pas ses objectifs, et, comme plusieurs parcours similaires, tombe dans l’oubli presque total pour l’histoire.