Les vingt-cinq dernières années du Comité catholique du Conseil de l’Instruction Publique (1939-1964) : entre la réalité et l’idéologie

Résumé

Modèle hybride de gouvernance, le Comité catholique se retrouve, entre 1939 et 1964, dans la position de superviser et de contrôler jusqu’à un certain point la partie catholique du système public d’éducation québécois. Ce système existe en parallèle avec deux autres, le système de l’enseignement professionnel et spécialisé qui relève, sauf trois exceptions, de différents ministères, et le réseau des collèges classiques et des universités considéré comme appartenant au secteur privé. Cette surveillance et ce contrôle sont-ils complets? Le Comité catholique est-il entièrement autonome et indépendant? Le gouvernement a-t-il abandonné son pouvoir d’initiative? Rien n’est moins sûr. Contrairement à ceux qui soutiennent qu’il avait les coudées entièrement franches, nous estimons qu’il était soumis aux mêmes règles et sur le même pied que tous les comités du Parlement, ceux-ci devant faire approuver leurs recommandations et leurs règlements par le Lieutenant-gouverneur en conseil. Qui plus est, le Code scolaire de 1919, qui contient la Loi de l’Instruction publique, mentionne très clairement, que « dans l’exercice de leurs fonctions, les membres du Comité catholique [sont] assujettis aux ordres et instructions que [peut] leur adresser le Lieutenant-gouverneur en conseil ».

Héritier de ce modèle de gouvernance hybride, le Comité catholique évolue, pendant la période que nous étudions, à l’intérieur d’une société nettement différente de celle de la fin du XIXe et du début du XXe, et doit répondre à des besoins et à des défis nouveaux. Sous la pression du baby-boom, et par la force des choses et des événements, il ne fonctionne pas à vide, mais, selon son habitude, il travaille lentement, confiant dans sa bonne étoile et dans la pertinence de sa mission. N’est-t-il pas à la tête du « meilleur système d’éducation au monde »? Les difficultés qu’il rencontre sont de plusieurs ordres, physique et matériel, systémique et organisationnel, d’abord, mais surtout d’ordre philosophique et intellectuel. Peu au fait de la nouvelle sensibilité qui est en train de se cristalliser, peu enclin à confronter sa perception de la réalité et son expérience à celles de ses voisins immédiats protestants et canadiens-anglais ou américains, il jauge et juge tout à l’aune de la doctrine catholique – programmes, structures, manuels, formation des enseignants, centralisation scolaire, coordination des enseignements – au détriment et au mépris de la vraie vie et de la réalité du monde ordinaire.

Un lutte pratiquement perpétuelle entre la réalité et l’idéologie catholique, voilà ce que nous semblent avoir été les 25 dernières années du Comité catholique. Et le cœur du problème. L’insuffisance du personnel, le manque de leadership de ses principaux dirigeants, la lourdeur, la complexité et l’opacité de ses méthodes de travail, l’incapacité chronique de reconfigurer des structures et des niveaux d’enseignement qui aient du sens et de la cohérence et d’imaginer des solutions qui eussent permis de régler la jonction du système public avec le réseau universitaire et celui de l’enseignement spécialisé, la longueur démesurée du processus de révision des programmes, ainsi que les accidents de parcours que constituent les enquêtes sur l’École normale Jacques-Cartier et les manuels scolaires, sans oublier les insolences du frère Untel, doivent aussi être pris en compte. Ces divers éléments sont toutefois subordonnés au combat incessant mené par le Comité catholique pour imposer ses valeurs et sa conception de la vie et de l’éducation à une société déjà hyper-christianisée, mais en pleine mutation.

Année de publication
2013
Type
Thèse de doctorat
Université
Université du Québec à Montréal
Nombre de pages
329
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