Les paroisses polonaises à Montréal (1979-1989) : la construction symbolique et socio-politique de l’identité des Polonais montréalais lors des évènements de Pologne
Il y a quatre paroisses romaines catholiques polonaises à Montréal. Celles-ci sont M.B. Częstochowskiej (Notre-Dame de Czestochowa), św. Trójcy (Sainte-Trinité), św. Michała i św. Antoniego z Padwy (Saint-Michel et Saint-Antoine) et Misja św. Wojciecha i św. Maksymiliana (Mission de Saint-Adalbert et de Saint-Maximilien). Elles sont des paroisses personnelles, c’est-à-dire qu’elles attirent des fidèles qui n’habitent pas nécessairement leur territoire, mais qui choisissent de les fréquenter pour de multiples raisons. Puisque la communauté polonaise montréalaise est petite et n’est pas ghettoïsée, les paroisses agissent donc comme des pôles d’attraction pour les membres de la communauté qui y viennent non seulement pour s’y recueillir, mais également pour y préserver leur culture et leur identité polonaise. Au tournant et durant la décennie 1980, la Pologne a connu des évènements marquants qui ont changé son histoire : l’élection du cardinal Wojtyła à la Papauté en 1978; la création en 1980 du premier syndicat libre en Europe de l’Est communiste, Solidarité; l’imposition de la loi martiale en 1981; l’assassinat du Père Popiełuszko en 1984; et la chute du communisme en 1989. Ces évènements ont eu des répercussions sur la communauté polonaise montréalaise.
Nous affirmons que les paroisses ont joué un rôle clé pour la communauté polonaise à cette époque, notamment dans le processus de création et de recréation identitaire de ses membres. Par solidarité et par le sens du devoir envers la patrie et la nation au nom d’une certaine conception de la polonité, les Polonais fréquentant les paroisses polonaises se sont mobilisés en fournissant trois types d’aide : spirituelle (prières, messes, homélies), à la Pologne (envois de médicaments, de nourriture, d’argent) et aux réfugiés (parrainage, cours de langue, aide pour trouver un emploi, etc.). Dans ce processus de mobilisation, les paroisses ont joué un rôle très important pour la communauté. Gardiennes des traditions, de la culture et de la langue polonaises en sol montréalais, celles-ci ont stimulé chez leurs membres un sens d’appartenance à la nation polonaise. Un sentiment d’unité s’est concrétisé entre la communauté montréalaise, la diaspora polonaise mondiale et la Pologne. L’existence de cette solidarité transnationale économique, culturelle et religieuse entre la communauté montréalaise et la Pologne a été un facteur de mobilité important pour les immigrants de la vague Solidarité et les paroisses ont été des agents importants dans la création d’un tel réseau. Le processus de création et de recréation identitaire symbolique, social et politique des paroissiens polonais montréalais vis-à-vis des évènements se déroulant en Pologne durant les années 1980 a notamment varié d’un individu à l’autre selon sa vague d’immigration ou de sa génération. Par ailleurs, la religiosité polonaise a eu une grande importance dans la définition de la polonité des paroissiens polonais au cours de cette période.