Le divorce au Québec, 1964-1972 : un débat de société
De nos jours, le divorce fait partie des réalités familiales de la société occidentale et depuis sa libéralisation dans les années 1960, la conception du mariage a pris un tout nouveau sens. Avant la loi canadienne du divorce de 1968, la société québécoise a longtemps rejeté l’accès au divorce, la pratique étant en contradiction avec ses valeurs franco-catholiques et avec certaines dispositions de son Code civil. Il est ainsi intéressant de comprendre comment les Québécois ont discuté du divorce avant et après la proclamation de la loi fédérale de 1968, de saisir les arguments en faveur ou non du divorce et de déceler les spécificités et les retombées de cette réforme majeure du mariage québécois.
Par le biais de notre lecture de diverses sources populaires, nous sommes arrivés à un constat plutôt étonnant, celui d’une approbation générale pour l’élargissement de la loi sur le divorce. Dans l’époque révolutionnaire des années 1960, d’importantes mutations morales entourant la sexualité, le mariage et la famille viennent encourager la réforme de la loi. La population québécoise est consciente que la loi ne correspond plus aux pratiques et aux moeurs des années 1960 et qu’elle doit être modifiée selon les nouvelles réalités, sans toutefois encourager le divorce. Des conditions et des motifs précis pour divorcer façonnent la loi sur le divorce de 1968; pour prévenir le divorce, les législateurs n’autorisent pas le divorce pour simple échec du mariage et obligent des mesures de réconciliation de la part des époux. La société et le législateur ne peuvent autoriser une loi du divorce trop libérale et permettre ainsi des divorces sur un coup de tête. Une fois la loi canadienne et son administration mise en place en juillet 1968, une importante course au divorce par les couples québécois, dont l’ampleur n’est pas prévue par l’État, force la province à modifier ses lois matrimoniales. Le mariage civil et l’insertion du divorce dans le Code civil québécois viennent laïciser le mariage et rendre la loi fédérale applicable au Québec. Durant les années 1968 à 1972, les spécialistes en sciences sociales sont reconnues [i.e. reconnus] pour leur expertise par la société, les avocats et les juges sont nommés pour professionnaliser les cours de divorce et ainsi faciliter la décision lors des procès en divorce. Les couples font de plus en plus usage du divorce, en voulant régler des situations intolérables et ils sont ainsi libérés de leur mariage raté, mais il n’en demeure pas moins un drame familial pour autant. L’Église catholique et ses représentants doivent par ailleurs modifier leurs attitudes à l’égard du nouvel accès au divorce en procédant à des mesures accommodantes pour ses fidèles divorcés.