La pensée d’Edmond Turcotte, éditorialiste au journal Le Canada (1931-1937)
De 1931 à 1937, l’intellectuel libéral Edmond Turcotte est éditorialiste au journal Le Canada, un quotidien montréalais qui reflète les idées du parti libéral. Il en devient le rédacteur en chef de 1934 à 1937, au plus fort de la crise économique.
Notre analyse de la pensée de Turcotte porte sur ses prises de position pendant une décennie où le système capitaliste est tenu responsable de la dégringolade économique. Acquis aux valeurs du libéralisme, il défend le système économique et les institutions politiques, ce qui l’oblige à entamer une profonde réflexion sur ses valeurs et sa vision du monde. Le système capitaliste lui apparaît capable de se réformer; il propose ainsi un meilleur encadrement par l’État des entreprises de services publics et il voit la nécessité de mettre en œuvre certaines politiques sociales. Ses propositions restent cependant timides, marquées par la crainte du paternalisme d’État. Peu inquiet de la centralisation au fédéral des politiques sociales, il ne partage pas le désir des penseurs nationalistes québécois de protéger l’autonomie provinciale. Il développe d’ailleurs un discours antinationaliste modéré, estimant que les valeurs libérales se réconcilient mal avec celles du credo national.
Finalement, il s’emploie à défendre la démocratie, appréhendant particulièrement la florescence internationale du fascisme et du communisme et l’influence de ces courants au Québec. Pour faire contrepoids au virage à droite que prend la société québécoise, il redouble d’ardeur pour combattre le fascisme et le duplessisme et il prend une position courageuse sur la Guerre civile espagnole. Cela lui vaut d’être traité d’extrémiste de gauche par les groupes nationalistes. Victime de la répression des forces de droite qui consolident alors leurs acquis, il doit quitter son poste au journal Le Canada en 1937.