Jeunesses populaires sous le regard de la justice : naissance du tribunal pour enfants à Angers et Montréal (1912-1940)
À l’orée du XXe siècle, avec le développement d’un État social dans les pays industrialisés, on assiste à un mouvement de prise en charge de l’enfance déshéritée. Dépassant la notion d’enfance « coupable », les acteurs du champ de gestion des déviances juvéniles orientent leur discours vers le concept d’enfance « en danger moral », laquelle doit bénéficier de mesures de protection. C’est la naissance d’un droit spécifique des mineurs, incarné par les tribunaux pour enfants. Ainsi, les États se donnent le droit d’intervenir dans la sacro-sainte famille, dont on estime que les classes populaires n’assument pas toujours la fonction éducative et socialisante. Cette nouvelle justice des mineurs fut l’initiatrice du processus de dépénalisation des déviances juvéniles, de prise en charge psycho-éducative des jeunes délinquants, ou encore d’assistance éducative des familles, orientations aujourd’hui âprement discutées sur les scènes politiques occidentales.