Days and Nights: Class, Gender and Society on Notre-Dame Street in Saint-Henri, 1875-1905

Résumé

Dans l’histoire du Québec de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, la vie quotidienne des personnes dans la rue n’a pas reçu l’attention à laquelle elle pouvait prétendre. Cette thèse rejoint un nombre limité d’études récentes qui tendent à redresser cette négligence. Elle marque une contribution significative aux examens existants des villes non-américaines et l’histoire sociale du Canada grâce à l’usage de catégories peu employées et de questions rarement soulevées dans les recherches sur l’histoire de la classe ouvrière pendant la période d’industrialisation. Une approche holistique de la philosophie marxiste offre les fondements théoriques pour un engagement sensible face à la vie quotidienne de la rue en milieu urbain. A titre de lieu intense de sociabilité, la rue Notre-Dame, rue principale de la banlieue de Saint-Henri, livre une perspective unique de l’usage complexe de l’espace public et de ses liens avec l’espace social. Cette thèse couvre la période s’étalant des années de l’incorporation de la ville en 1875 à celle de son annexion à la ville de Montréal en 1905.

La rue Notre-Dame a subi des changements notables durant cette période. De rue principale d’une petite ville aux abords de Montréal, elle devient la principale artère commerciale d’une ville industrielle empressée. La décennie 1890 a été plus particulièrement marquée par des changements importants, caractérisés par une croissance significative de la population et des changements d’envergure dans la forme physique. En conséquence, des tensions entre classes et ethnies se sont intensifiées. En 1891, une dispute de travail à l’usine Merchants Manufacturing s’est propagée dans les rues et l’élite locale contestait le refus de George A. Drummond de payer des taxes municipales en 1897. L’usage de pétitions, de protêts ou de lettres notariées témoignait de la résistance face au monopole de contrôle des services. Les partis politiques des travailleurs et travailleuses, les journalistes, et les ligues de réforme municipale mettaient au défi l’élite locale dont les pratiques incessantes de dépassement budgétaire ont eu pour conséquence une dette substantielle et l’annexion.

L’étude d’une rue locale au sein d’une communauté industrialisée montre la distribution dominante. sociale et politique. des biens et du pouvoir. Cela met en lumière des différences significatives entre les idéologies de classe diversifiées qui se manifestaient dans la gestion de l’espace public de la rue. Une idéologie économique libérale contribuait au développement d’une ville moderne occidentale par la création de divisions entre espaces publics et privés. Toutefois, l’usage social, la présence visible des classes laborieuses et marginales et des femmes suggère une réalité différente. À partir d’une grande variété de sources écrites et visuelles, la reconstruction de la vie quotidienne dans la rue montre que les femmes, les hommes et les enfants vivaient et fréquentaient les maisons, les boutiques et les bureaux sur le chemin du travail et au retour, ainsi que plusieurs autres lieux de loisir. Le rythme de la vie quotidienne de la rue était ponctué par des événements inhabituels de nature commémorative. criminelle et tragique qui mettaient l’accent sur les liens entre structures spatiales et expérience subjective.

Ainsi, la gestion locale de l’espace public entraînait des antagonismes de classe, caractérisés par la négociation, la transgression et la résistance. Cette thèse postule que les politiques de cet espace public profitaient aux intérêts de classe d’une grande bourgeoisie de Montréal et d’une petite bourgeoisie locale, au détriment des classes ouvrières. Ces intérêts conflictuels de classe se manifestaient de plusieurs manières. L’exclusion et l’appropriation des espaces sociaux et symboliques s’exprimaient par des modèles distincts de propriété et de location. Une grande bourgeoisie anglophone possédait des lotissements vides et divisés. Une petite bourgeoisie francophone dominait la propriété foncière et une majorité de locataires vivaient dans les logements de la me principale et dans les rues adjacentes de la ville. La forme de l’infrastructure physique était synonyme de croissance des monopoles et d’intervention locale minime. La manifestation civique de la célébration réglée et rituelle de la parade accentuait l’identité catholique. Les tentatives visant à imposer un code de comportement approprié et élégant dans les rues de la ville ont conduit à la régulation morale et au contrôle social du comportement criminel.

Auteur
Année de publication
2000
Type
Thèse de doctorat
Université
Université McGill
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