Godbout
Agronome et professeur, puis député et ministre, Adélard Godbout a succédé à Louis-Alexandre Taschereau en juin 1936, le temps d’une campagne électorale qui fut fatale à son parti. À l’automne de 1939, il prenait sa revanche sur Duplessis et devenait premier ministre du Québec dans une période particulièrement difficile, la Seconde Guerre mondiale.
De son seul mandat à la direction du gouvernement du Québec, bon nombre de Québécois ont surtout retenu deux éléments liés au contexte de guerre : la grave crise de la conscription et les politiques centralisatrices du gouvernement fédéral. Et ils ont gardé de Godbout l’image d’un homme politique inféodé à Ottawa.
Au sujet de tout personnage politique, une question ne manque pas de surgir : qu’est-ce qui l’a emporté chez lui, le politicien ou l’homme d’État? En ce qui concerne Godbout, la réponse ne fait aucun doute. Il fit passer l’intérêt de l’État avant son avantage personnel et électoral. En témoignent des mesures comme l’étatisation de la Montreal Light Heat and Power Co., l’instruction obligatoire, le suffrage féminin, l’abandon du « patronage » malgré les récriminations des libéraux.
En somme, Godbout était avant son temps. La valorisation du rôle de l’État et de la fonction publique, l’importance attachée à l’éducation, le respect de la démocratie, autant d’orientations qui ne comptaient pas parmi les préoccupations de ses compatriotes dans la décennie 1940-1950. Ce qui explique en partie le passage rapide de Godbout sur la scène politique. On peut regretter que l’ère des réformes qu’il a inaugurée n’ait pu se poursuivre, le Québec n’aurait pas attendu les années 1960 et la Révolution tranquille pour changer de visage.