La bataille de Québec
Comme souvent dans l’histoire, la situation géographique stratégique d’un territoire suffit à susciter convoitises et conflits. Il y a 250 ans, les révolutionnaires américains lançaient une offensive pour contrôler la Province de Québec, conquise par les Britanniques une décennie auparavant.
En 1774, Londres promulgue l’Acte de Québec, qui tolère la religion catholique, rétablit les lois civiles françaises et étend la colonie jusqu’à la vallée de l’Ohio. Ces mesures, combinées à de nouvelles taxes, sont une provocation aux yeux des Treize Colonies. Dans ce climat tendu, une guerre pour leur indépendance semble inévitable. Le 27 juin 1775, après des appels aux habitants de la Province de Québec restés sans réponse, le Congrès continental autorise l’invasion militaire de la colonie.
Une double invasion venue du sud
Le gouverneur Guy Carleton prépare la défense de la Province. Il proclame la loi martiale et mobilise la milice. De son côté, l’Église catholique exhorte les Canadiens à rester fidèles à la Couronne britannique. À la fin de l’été, deux armées se mettent simultanément en route vers le nord afin de s’emparer de la colonie.
Le général Philip Schuyler et Richard Montgomery avancent vers Montréal par le lac Champlain avec environ 1 000 hommes. Montgomery s’empare du fort Chambly en octobre, puis du fort Saint-Jean en novembre. Schuyler, malade, lui cède le commandement. Le 13 novembre, Montréal tombe aux mains des troupes révolutionnaires américaines, qui installent leur quartier général au château Ramezay. Quelque 500 Canadiens se joignent à eux.
Pendant ce temps, Benedict Arnold mène ses 1100 hommes en empruntant les rivières Kennebec et Chaudière. Le trajet, long et éprouvant, coûte la vie à des centaines d’hommes ou les pousse à la désertion. À leur arrivée, ils ne sont plus que 600 soldats. Le 8 novembre, ils atteignent la rive sud de Québec. Dans la nuit du 13 au 14, ils traversent le fleuve et escaladent la falaise de l’Anse-au-Foulon pour atteindre les plaines d’Abraham. Arnold exige la reddition de la ville, sans succès. Ses troupes, épuisées, affamées et dépourvues d’artillerie, ne sont pas en état de combattre. Le 19 novembre, elles se replient à Pointe-aux-Trembles (Neuville) en attendant Montgomery.
La bataille de Québec
En décembre, Montgomery arrive à Québec et rejoint Arnold. Le 4 décembre, les troupes prennent position sur les plaines d’Abraham et dans les faubourgs. Les rebelles somment en vain le gouverneur Carleton de capituler. Ville fortifiée, Québec est alors défendue par le colonel Allen Maclean, appuyé par environ cent soldats britanniques et des miliciens canadiens. Du 8 au 14 décembre, les Américains érigent une batterie pour bombarder Québec, mais le sol gelé ralentit les travaux.
Tôt le 31 décembre 1775, les forces américaines lancent une attaque coordonnée sur la basse-ville tout en menant une diversion en haute-ville, du côté du cap Diamant. En pleine tempête, Montgomery mène l’assaut par le sud avec 300 hommes. Progressant péniblement entre blocs de glace et grands vents, ses troupes sont repérées près de place Royale. Arrivées à la hauteur du bastion du Cap-Diamant, elles se heurtent à une barricade défendue par une trentaine de miliciens canadiens. Ces derniers ouvrent le feu : Montgomery est tué sur-le-champ. Désorganisées, ses troupes battent en retraite.
De son côté, Arnold dirige 600 hommes dans l’assaut du nord. Enfoncés dans la neige, ils abandonnent leur unique canon. Sous les tirs des Britanniques postés sur les remparts, les soldats longent la falaise vers la rue Sault-au-Matelot. Blessé, Arnold cède le commandement à Daniel Morgan.
Dans les rues étroites, les soldats américains sont encerclés par des miliciens. Piégé, Morgan se rend rapidement. Vers 10 h, la victoire britannique est confirmée.
Conséquences
Malgré une épidémie de variole, les troupes américaines assiégeront Québec jusqu’en mai 1776, avant de battre en retraite. Le 15 juin, elles abandonneront finalement Montréal, marquant l’échec de leur invasion.
Les États-Unis obtiennent toutefois leur indépendance en 1783. Les répercussions seront importantes pour la Province de Québec, tant sur le plan territorial – avec la cession de la vallée de l’Ohio aux Américains – que démographique, en raison de l’arrivée massive de loyalistes et l’installation de mercenaires allemands.