Gens du pays : la chanson de tous les Québécois

20 juin 2025

Il y a 50 ans, ce mois-ci, Gilles Vigneault faisait l’un des plus beaux cadeaux qu’on ait jamais donné aux Québécois : la chanson Gens du pays. Pour souligner notre Fête nationale, nous vous offrons ici l’historique de cette chanson qui est en quelque sorte notre hymne national.

Gens du pays interprétée pour la première fois le 20 juin 1975 par Gilles Vigneault, Louise Forestier et Yvon Deschamps. Source : Alain Chagnon.
Gens du pays interprétée pour la première fois le 20 juin 1975 par Gilles Vigneault, Louise Forestier et Yvon Deschamps. Source : Alain Chagnon.

En 67, « tout était beau »

À la fin des années 1960, les fêtes de la Saint-Jean-Baptiste sont marquées plus que jamais par les bouleversements sociaux et politiques. La société québécoise est alors déchirée entre la fidélité au Canada français, à ses traditions et son héritage catholique, et l’avènement d’un Québec moderne, avec ses progrès et son désir de plus de liberté. La Saint-Jean-Baptiste, une fête religieuse à caractère solennel, devient un moment où les tensions sociales éclatent. Notamment, en 1969, lors du défilé à Montréal, des manifestants renversent la statue de saint Jean-Baptiste et lui brisent le cou – lui faisant carrément perdre la tête.

À la suite de la crise d’Octobre 1970, les autorités sont échaudées. Elles décident de ne plus organiser de parade de la Saint-Jean-Baptiste. Malgré cette décision, les Québécois n’en perdent pas leur fierté nationale ni leur goût de célébrer pour autant. En effet, au lieu d’organiser des parades s’inspirant des processions catholiques comme autrefois, les Québécois cherchent de nouvelles manières d’exprimer ce qu’ils sont. Surtout, ils veulent montrer au monde ce qu’ils souhaitent devenir.

Happy Birthday? No way!

En 1975, une série de festivités sont organisées en plein air, sur le mont Royal à Montréal. L’événement est annoncé partout dans les journaux, à la radio et à la télévision. Un spectacle à grand déploiement doit être donné sur une scène, près du lac aux Castors, avec trois artistes de marque : Louise Forestier, jeune chanteuse trentenaire révélée par L’Osstidcho; Yvon Deschamps, humoriste de quarante ans déjà bien établi; et Gilles Vigneault, le chantre de Natashquan, dont les textes étaient chantés depuis plus de vingt ans par divers interprètes.

Comme à chaque anniversaire, la plupart des Québécois sont habitués à chanter Happy Birthday. Mais pour quelle raison devrait-on chanter en anglais, le jour de l’année où l’on souligne tout ce qui nous unit, à commencer par notre langue française? En vue de leur spectacle, les trois artistes se réunissent en mai 1975 pour composer une nouvelle chanson d’anniversaire. Tandis qu’Yvon Deschamps et Louise Forestier travaillent chacun sur un couplet, Gilles Vigneault leur propose ce refrain : « Gens du pays, c’est votre tour, de vous laisser parler d’amour... » Les deux autres sont aussitôt emportés par ces paroles, chantées sur un rythme de valse. Ils sont si impressionnés qu’ils laissent Vigneault écrire tout le reste de la chanson. En effet, on l’oublie parfois, mais cette chanson comprend non seulement un refrain, mais aussi trois couplets!

Le spectacle a lieu le soir du 20 juin 1975. Devant une foule de 150 000 personnes – des jeunes, pour la plupart – la chanson Gens du pays est interprétée pour la première fois par Vigneault, Deschamps et Forestier. Cette chanson résonne aussitôt dans les oreilles et le cœur de tous les spectateurs.

Le temps que l’on prend pour dire Je t’aime...

À la Saint-Jean-Baptiste de 1976, la chanson sera reprise devant une foule de plus de 400 000 personnes sur le mont Royal, dans le cadre du spectacle 1 fois 5 avec Robert Charlebois, Yvon Deschamps, Jean-Pierre Ferland, Claude Léveillée et Gilles Vigneault. Gens du pays se répand dans les rues, les quartiers et les maisons. La chanson est définitivement adoptée par les Québécois.

Gens du pays est devenue aujourd’hui un classique. On la chante à chaque anniversaire, en remplaçant « gens du pays » dans les paroles du refrain, par le nom de la personne fêtée.

Et c’est maintenant à votre tour, chers lecteurs, de vous laisser parler d’amour...

 

Spectateurs de la Fête nationale agitant des drapeaux du Québec