Éric Bédard reçu à l’Académie des lettres du Québec

C’est pour y voir plus clair, mettre de l’ordre dans le chaos, que j’écris

Écrire sur l’histoire de mon Pays pour surmonter la rupture introduite par la Révolution tranquille, reprendre le dialogue avec des anciens, interroger une tradition de débats, renouer avec une intention collective qui allait prendre forme dès le milieu du 18e siècle. Écrire sur les Réformistes, pour m’approcher d’une génération confrontée à des défis bien plus dramatiques que les nôtres. Écrire sur nos commencements pour mieux entrevoir et comprendre des origines. Écrire pour offrir à mes contemporains un sens de la continuité, un regard peut-être un peu plus empathique et généreux sur le passé que celui qui m’a été légué.

Mais écrire aussi pour mieux comprendre qui l’on est, pour se dévoiler à soi-même, répondre à une sorte d’impérieuse nécessité intérieure. Tenir son journal (comme je le fais depuis 1993), consigner ses réflexions du moment, ses bons coups et ses regrets, ses rencontres inspirantes, ainsi laisser une trace de l’histoire qui se fait sous nos yeux et à laquelle on prend part bien malgré soi, même si on reste un acteur secondaire de la grande Histoire. Écrire des « essais » sur des questions sensibles, prendre parti, ainsi comprendre les valeurs qui façonnent notre sensibilité. Tel un mémorialiste un peu précoce, revenir sur sa jeunesse, en proposer un récit personnel, tracer quelques portraits de personnages qu’on a croisés et qui nous ont marqué.

Écrire pour s’inscrire dans une continuité collective. Écrire pour mieux se comprendre et se connaître. Écrire pour témoigner.